Dans la grotte (ou le rêve d'une petite fille)

Partie plus que tôt ce matin, avec dans l'idée d'aller chatouiller les côtes de quelques gobelins, je quittais le domaine des Vindicatrices, mon arc au côté, prête à en découdre, très en forme.

Je descendis sur Mérulik et observai les alentours avec circonspection. C'est vrai, depuis que Kaldrass et son imbécile de frère s'étaient brouillés, l'endroit était devenu vraiment trop mal famé pour qu'on s'y aventure gaiement !

J'avançai tranquillement et croisai seulement deux ou trois genouilles, fort heureusement aveugles, qui n'échauffèrent que mon arc. Arrivée au sud de la ville, je cherchai des yeux la fameuse grotte où les gobelins, soit-disant, aiment tant se prélasser.

Grâce aux indications très précises de quelques uns d'entre vous, je la trouvai sans mal. Vérifiant mes armes conscencieusement (je ne suis pas suicidaire, non plus !), j'entrai dans la fraîche pénombre, attentive à tous mouvements suspects. Accroupie près de l'entrée, j'attendis que mes yeux s'habituent à l'obscurité avant de m'aventurer plus loin (Non, je n'avais pas peur, pas du tout !)...

Quelques minutes passèrent ainsi. Pas très à l'aise, j'attendis encore un long moment, me demandant où se situait le problème. Soit j'avais fait du bruit et ils étaient prêt à me sauter dessus au moindre faux pas (pas très crédible quand même : tout le monde connaît ma légendaire discrétion... non ?).

Soit... il n'y avait personne... Me serais-je trompé de grotte ? Alors là, pas très glorieux comme situation... Pas grave ! Je remballe mes affaires, je rentre avant que quelqu'un ne se réveille et hop! Ni vu ni connu !

Finalement, parce que je suis quelqu'un d'extrêmement courageux, je sortis de mon recoin sombre et avançai presque sans trembler. La grotte était belle et bien déserte ! Je trouvai bien quelques crottes de-ci de-là (de gobelins, bien sûr !) mais aucune autre trace de mes futures-ex-victimes, pas même un cadavre.

Un peu énervée quand même (Rappelez-vous, je suis sortie du lit de très bonne heure ! Et Hamster peut témoigner, je ne suis pas une lève-tôt !), je rengainai mes flèches et mon arc et commençai à explorer, dans l'espoir de trouver quelques bricoles à rapporter. C'est vrai, quoi ! C'est comme si j'étais parti à la pêche dans une rivière et que le poisson s'était barré au bord de la mer ! (Je sais, c'est bête comme comparaison... Mais j'étais vraiment énervée !)

De rage, je balançai le pied en direction d'une espèce de motte de terre. Si vous l'aviez vu venir, félicitations ! Moi j'étais trop énervée ! BOUM ! Un objet plus que lourd était comme par hasard dissimulé sous la motte de terre, à la portée de mon pauvre pied ! Pliée en deux (pas de rire, rassurez-vous), je déblayai la terre pour découvrir l'objet de ma douleur...

Un petit coffret à moitié rouillé attendait là sagement que je me casse le pied dessus !

Je pris quand même le temps de l'ouvrir (sait-on jamais !). Après m'être acharné pendant dix minutes, une de mes pointes de flèches finit quand même par avoir raison de la serrure. A l'intérieur, une étrange surprise m'attendait !

Placé en lieu sûr, reposait un pendentif bleu, qui me laissa perplexe : il s'agissait sans erreur possible de celui que j'avais perdu enfant ! Je le reconnaissais sans aucune hésitation, d'autant que mon nom était gravé au dos ! Par quel miracle se trouvait-t-il en ces lieux ?

J'étais perdu dans mes réflexions quand j'entendis du bruit : quelqu'un approchait... Empochant le pendentif, je reculai dans la pénombre pour observer, mon arc à la main. Ma surprise fut grande : une petite fille arrivait sans crainte. Elle se dirigea sans hésiter vers l'endroit où était auparavant (mal) dissimulé le coffret. Voyant ce dernier à terre, ouvert et vide, elle eu un temps d'arrêt et se mit à pleurer.

Soudain, la compréhension fit jour dans mon esprit ! Je me souvins de ce jour si particulier où j'avais caché ce pendentif dans un coffre et dasn cette grotte, à l'époque vide de gobelins ! J'étais revenue quelques jours plus tard et le bijou avait disparu...

A cette époque déjà, je n'avais plus qu'une idée en tête : j'admirai tellement Zellandra que je ne rêvais que d'entrer à son service et de devenir archère. et je me rappelai alors cette venue dans la grotte : après avoir constaté la perte de ce pendentif et pleuré toutes les larmes de mon corps, j'avais relevé la tête et dans un rayon de lumière, j'avais aperçu une archère toute équipée. Bouche bée, je m'étais persuadée de m'être vue moi-même quelques années plus tard...

Perdue dans mes souvenirs, je ne m'étais pas rendue compte que le soleil était bien plus haut dans le ciel. Il pénétrait en partie dans la grotte et je m'aperçus qu'il m'éclairait entièrement. Levant les yeux, je croisais ceux de la petite fille en face de moi. Mon coeur bondit car je sus instantanément l'image que je lui offrais...

A mesure que les larmes brouillèrent ma vision, un étrange picotement prit place sur ma peau. Quand je clignais des yeux pour en chasser les larmes, je me rendis compte que la grotte était redevenue sombre. La petite fille avait disparu...

Ce qui était APPARU par contre, c'était un énorme gobelin ! Je me ressaisi, l'éliminai en un rien de temps (fallait pas me soûler, là!) et sortis précipitemment de la grotte. Je rentrai saine et sauve au manoir, mais très ébranlée par mon voyage dans le temps...