Eliyane - Aussi loin que je peux.

Sombre. Morose. C'était l'humeur de la jeune archère. Décidément la vie avait pris un malin plaisir à prendre des tours et détours pas forcément tous agréable. Sa mort et sa résurrection en moniale, ses fiançailles avec Chouta, la disparition de Cristy, et à termes des anges noirs, le conseil avec Death et la création de cette nouvelle faction, sa décision de reprendre ses activités d'archère. Et ses cauchemars. Tout ses terribles cauchemars qui nuits après nuits, revenait sans cesse en lui gâchant la vie. J'étais hantée. Hantée par la peur de mourir. Hanté par la peur de devoir de nouveau subir ces tortures, ses mains qui se faufilaient impérieuses, repoussantes. Ses mains je les sentais presque s'insinuer sous mes vêtements. Je me rejetais en arrière étendue sur mon lit les yeux fermés, essayant tant bien que mal de faire passer la crise de larmes qui montait. Sans y parvenir. Serrant le plus possible fort mes petits poings pour échapper à ces images, je tressaillie à peine lorsque les ongles entamèrent la peau, laissant le sang perler. Les larmes coulèrent inondant les draps, j'étais prisonnière d'évènements passés depuis plusieurs mois. Cela devait cesser. Cela DOIT cesser! Mais comment? Je revis encore une fois le visage de chacun de mes tortionnaires, du plus infime détail au plus négligeable, ils étaient là, gravés dans ma mémoires.

Cesse tes jérémiades petite sœur et reprends toi! Tu n’as qu’à les tuez tous, tu verras cela t’exorcisera l’esprit et tu pourra me laisser enfin dormir tranquillement!

Silence toi! Que sais tu de cette douleur tu était morte quand cela est arrivé!

Je te connais mieux que toi stupide garce! Je suis toi ne l’oublie jamais, je sais parfaitement comment tu fonctionnes! Au fond de toi tu rêves de tous les massacrer, de les tuer les uns après les autres! Accepte le et ne m’importune plus il est pénible de dormir dans un esprit dérangé comme le tien!

Va au diable!

Trop tard mon double était déjà parti, me laissant seule dans un éclat de rire… Seule avec cette graine qui germait au fond de moi, cette graine de haine qui nuit après nuit jour après jour pendant trois longs moi avait plonger ses racines à l’intérieur de mon être.
Encore sous le coup de mon rêve, j’attrapais une plue et une série de feuilles, je ne me débrouillais pas trop mal en illustration et au bout de quelques heures je terminais le dernier portrait. Treize. Treize feuilles s’alignait les unes à cotés de autres avec chacune un visage. Bien c’est un début… et maintenant? Nedmor, c’est de là bas qu’ils venaient… mais je ne connais pas du tout cette ville, il me faut de l’aide mais à qui m’adresser?
Druluth? Non c’est un bon voyageur mais je doute qu’il puisse m’aider une fois sur place. Death, n’en parlons pas pour le coup il serait fichu de s’arrêter dans toutes les tavernes et d’aller courir les filles de joie. Busard? Trop … taciturne. Chouta? Non je ne veux pas l’exposer, je ne veux pas qu’elle voie ce que je vais faire… mais qui bon sang? Frappant du poing sur la table je réfléchie… oui oui ça devrait être l’idéal! Rapidement je rédigeais une lettre à un vieil ami.


"Salutations,

Puisse cette lettre te trouver en bonne santé et l’esprit en paix,

Malheureusement c’est pour te plonger dans une sombre histoire

Qu’aujourd’hui je fais appel à toi.

Tu n’ignores rien des évènements qui se sont déroulés il y a quelques mois,

Depuis je suis hantée par ces souvenirs, à un point tel qu’il ne m’apparaît qu’une

Seule voie pour ne pas sombrer instamment sous la folie.

Ackeros retrouve moi le plus rapidement possible chez moi, j’ai un besoin urgent

d’une aide que toi seul peux m’apporter.

Amitiés, Eliyane."



La lettre rédigée, j’attrapais un du rapace apprivoisé et l’envoyait prestement auprès de l’archer insoumis, espérant une rapide réponse et un soutien dans cette histoire. Je me rongeais les sangs en voyant disparaître à l'horizon l'oiseau de proie. Anxieuse à l'idée d'un refus et de se qui en découlerait.

Dans le campement des Insoumis, Ackeros était tranquillement installé dans sa cabane en haut d'un arbre, occupé à faire disparaître les entailles présentes sur son arbalète. Cette occupation devenue habituelle se faisait sans nécessiter une grande attention de sa part et il était perdu dans ses pensées lorsque Syl se dressa sur le lit derrière lui, sorti de son sommeil par l'arrivée d'un oiseau.

L'animal ne bougeant pas malgré l'attitude menaçante du chat sauvage, l'archer remarqua le message dont le rapace était porteur. Sans geste brusque il le retira de la patte. La lecture fut rapide et sans tarder il prit une plume et un bout de parchemin afin d'envoyer sa réponse. Sans fioriture comme à son habitude, quelques mots griffonnés sur le papier.

Message reçu, je serais là aussi vite que possible.

Syl, on part en balade...

Il attacha le parchemin à la patte du messager et le regarda s'envoler puis il se dirigea vers son coffre. Il en tira une veste en cuir noir, le gant destiné à sa main droite et sa cape rouge. Il attrapa un carquois plein et son arbalète et se dirigea vers les marches fixée au tronc de l'arbre où trônait sa demeure et celle de son aimée. Suivit par Syl il se dirigea vers la taverne et la sortie du campement, il pris juste le temps de prévenir Crush de son départ et de sa destination afin que ce dernier puisse prévenir les autres en cas de besoin et quitta le repaire des Insoumis.

Les mots d'Eliyane résonnaient dans sa tête alors qu'il parcourait le chemin d'un pas rapide. Il était rare qu'elle demande une aide aussi pressante et désespérée... Bien que les derniers temps aient été durs avec elle, elle avait toujours semblé tenir le coup, les apparences sont parfois trompeuses et les carapaces pas toujours aussi résistantes qu'on le souhaiterait. Lui-même en savait quelque chose... Il effaça ces réflexions de sa tête, il ne pourrait en savoir plus avant d'avoir vu son amie et rien ne servait de se torturer l'esprit avec tout cela. Après quelques heures de marche silencieuses, il arriva enfin au campement des francs-tireurs. Il allait enfin savoir ce qu'il pouvait pour l'archère.

L'archère attendait nerveuse l'arrivée de l'insoumis. Elle tenait encore le parchemin dans sa main lorsque du coin de l'oeil elle aperçue l'étoffe de la cape rouge de l'archer et le déplacement furtif du chat sauvage. Il y avait quelque chose de félin dans la démarche de l'homme, quelque chose de sauvage et de puissant qui rayonnait sans même qu'il ne s'en aperçoive. Eli agita le bras dans leur direction tout en sachant qu'elle avait déjà été repérée par le duo. Elle se précipita à leur rencontre.

Ackeros! Cela faisait un moment que l'on ne s'était vu! Avec un petit hochement de tête je saluais l'archer. Entre je te prie.

Entraînant les deux compères à ma suite, nous nous installions dans mes quartiers, m'affairant je sortis de la petite cuisine une chope de bière dont je savais friand l'archer. M'asseyant en face de lui sur mon lit, je versais dans un pot en terre cuite une infusion de chamallas pour moi même. Le silence s'appesantit encore, je ne savais pas comment énoncer mon projet. Gênée je plongeais le nez dans mon verre en scrutant Ackeros du coin de l'oeil, qui semblait attendre imperturbable. Puis n'y tenant plus, dans un effort pathétique pour lancer la discussion, je pris la parole.

Tu as fait bon voyage?

Un verre à la main, il attendait qu'elle lui explique de quoi il en retournait.

Tu as fait bon voyage?

Plutôt tranquille, c'était assez désert donc on peut dire que tout s'est bien passé. Mais si tu allais droit au but? Pas la peine de tourner autour du pot, racontes moi donc en quoi je peux t'être utile pour que tu retrouves la sérénité?

Il tournait négligemment sa chope sur la table, attendant une réponse de l'archère qui, bien que chez elle, semblait mal à l'aise. L'odeur de l'infusion de chamalla se répandait dans la pièce, apaisant les esprits. Il espérait qu'elle se détendrait quelque peu avec ça. Syl, quant à lui, avait déjà trouvé sa place sur le lit, roulé en boule à côté d'Eliyane.

L'infusion commençait à produire doucement son effet. Sans même vraiment s'en rendre compte, elle se retrouva en train de gratter l'arrière des oreilles du chat qui semblait y prendre plaisir. Intérieurement, Eli cherchait ses mots pour présenter son but à Ackeros, finalement n'y arrivant pas elle lança abruptement.

Je vais à Nedmor.

De surprise l'archer recracha la gorgée de bière qu'il venait de faire passer, regardant Eli comme si elle avait perdu la tête. Faisant comme si elle n'avait rien vu elle continua.

Je dois y aller... pour certaines raisons. Et pour cela j'ai besoin d'un guide. Quelqu'un de confiance sur qui je puisse m'appuyer et qui connaisse le terrain. Ack tu es le seul qui puisse m'aider... Je t'en prie...

Ses grands yeux verts braqués sur son ami, l'archère rejeta toute sa fierté ne laissant plus transparaître que sa douleur et sa détresse. Elle en était désormais réduite à cela, la carapace qu'elle s'était forgée avait voler en éclat, plus rien ne la rattachait à la réalité que la douleur et une soif débordante... Une étincelle dans le regard que l'archer connaissait bien...

Nedmor...

Il ne s'attendait pas vraiment à ça, ses doigts se resserrèrent sur sa chope. Elle semblait si fragile et pourtant si déterminée, quelles que soient les conséquences du choix d'une telle destination.

Nedmor hein...

Son verre se remit à tourner sur la table.

Plutôt surprenant... Bien sur que je pourrais t'aider, mais il faut que tu sois bien consciente des risques d'une telle entreprise. La ville est plus surveillée que jamais depuis le passage de Saculphir. Y pénétrer ne sera pas forcément très simple... Quant à s'y balader en toute impunité...

Ces yeux... Il avait déjà pris sa décision mais il ne pouvait lui dire qu'il acceptait aussi facilement. Il devait avant tout jauger sa volonté, bien que son regard en disait plus long que tout dialogue.

Il y aurait bien un moyen... il y a toujours un moyen... Mais je voudrais être sur que tu ne changeras pas d'avis devant les murs de la ville. Une fois la garnison de la porte passée, il sera aisé de se fondre dans la foule. Je pourrais te mener par des chemins discrets. Il faudra cependant me donner des indications plus précises avant que l'on s'y rende. J'ai besoin de savoir ce que tu souhaites y faire exactement...

Son esprit fonctionnait à toute vitesse, étudiant à l'avance les possibilités d'infiltration dans la capitale...

Eli se leva précipitent en se dirigeant vers une armoire, tout en l'ouvrant et en cherchant dedans elle se mis à parler à toute vitesse.

Je suis parfaitement consciente de ce que cela implique pour moi... comme pour toi d'ailleurs! Ta tête doit sûrement être mise à prix non? J'ai déjà passer tout cela dans ma tête, rassemblés mes souvenirs...

L'archère fit une pause et regagna sa place en face d'Ackeros. Elle débarrassa rapidement la table et éparpilla la liasse de feuillets sur celle-ci, une série de visage s'étalait devant l'archer. Treize portraits.

Je pars tuer ces hommes.

L'archer ne cilla pas.

Ces types, elle désigna chacune des feuilles tour à tour, faisait parti de l'armée régulière, je ne sais pas quel partie, ils n'avaient pas de signes distinctifs à part leur grandes capes rouges. A part l'officier, lui avait une sorte d'emblème sur son col, un gland par dessus deux épées croisées ça te dit quelque chose? Aucune idée de ce qu'ils étaient, je sais juste qu'au moins l'un d'eux utilise un arc. Quand je me suis réveillée, ils avait déjà dressés les camps et s'étaient débarrassés de leur équipement. Enfin bon, une fois cela fait, ce qui ne sera pas sans risque, je te l'accorde... Après ça sortir de Nedmor révélera de l'exploit... si ont réussit c'est toute la fourmilière qui va nous tomber dessus...

Eli marqua un temps de pause, tout se bousculait dans sa tête, enfin elle voyait son projet se concrétiser! Elle allait pouvoir apaiser son esprit torturer. Mais était ce vraiment une solution ou simplement une facilité? Cela arrangerait il réellement les choses? A dire vrai elle s'en moquait totalement, elle ne supportait plus ses cauchemars.

Ont pourra pas les avoirs tous d'un coup... il nous faudra une cache sûre et une bonne connaissance du terrain.

La jeune femme savait bien qu'elle demandait beaucoup à son ami. C'était sa vie qu'elle lui demandait de mettre en jeu. Sa vie sans aucune certitude de la conservée, la sienne elle s'en moquait bien maintenant, mais elle se refusait à envoyer un ami à la mort par pur égoïsme.

Acki... je... je sais que je t'en demande énormément, tu peux encore refuser, me traiter de folle et repartir. Elle redressa son visage soudain grave, pour regarder l'archer dans les yeux. Je comprendrais que tu ne m’accompagnes pas, ce n'est pas ton affaire après tout,...

Elle s'arrêta net en voyant son regard braqué sur elle, indéchiffrable.

Il parcourait du regard les portraits sur la table. Des inconnus, du moins pour lui... Des soldats... Il sera difficile de les éliminer en discrétion...

Des capes rouges hein...

Un grand sourire parcouru son visage.

C'est pas vraiment ce qui manque à Nedmor mais c'est justement ce qui pourrait nous aider.

On pourra aisément se cacher dans les bas-fonds de la ville, les patrouilles y passent mais ne s'éternisent pas en général. Enfin on verra bien sur place, il y a longtemps que j'ai cessé de préparer trop à l'avance mes intrusions dans les villes ennemies... La dernière fois m'a coûté bien trop cher.

Il posa la main sur son bras gauche qui porte toujours cette marque de semaines d'emprisonnement qui ont changé sa vie. Il jeta négligemment les quelques portraits qu'il tenait sur la table et se leva. Attrapant son arbalète et son sac, il regarda Eliyane.

Allons y, refermons ces pages de ton passé qui te font si mal. Et puis j'ai quelques personnes à voir dans la capitale, ce serait l'occasion idéale.

Il sourit à l'archère dont le visage rayonne à ces paroles.

On devrait pouvoir trouver un moyen de rentrer dans la ville sur la route, au pire on pourra toujours improviser. Attrape vite tes affaires, on se retrouve dehors.

Et il sortit, le vent rafraîchissant son visage. Sa soif de sang actuelle était déjà mise de côté pour laisser place à la joie de reprendre la route vers sa ville natale, refuge de tant de souvenirs. Une étrange insouciance s'ancrait dans son esprit malgré les raisons du voyage, il revoyait déjà les abords boisés de la cité, les berges du fleuve, les gens qui étaient encore là-bas...

Il tira sur sa tête sa capuche rouge en attendant son amie.

Avec un soupir de soulagement Eliyane se détendit un peu. C’est à ce moment là qu’elle remarqua sa tension, qui lui avait échappée jusqu’alors. Faire ses bagages… Facile, elle portait déjà la plupart de ce dont elle avait besoin…

Ta cape verte sera trop repérable là-bas…

Exact… à contrecœur elle raccrocha sa cape à une patère à l’entrée et sortit un coffre en chêne de dessous son lit. Faisant sauter le verrou d’un coup, l’archère fit basculer le couvercle répandant une odeur d’herbe séchée dans la pièce. Du coffre elle sortit un long paquet de toile huilée, fermé par une cordelette verte sombre. Elle déposa le paquet sur son lit et tira du coffre un vieux manteau de voyage, rouge sombre, une large capuche pendante. Caressant l’étoffe pensivement, elle remit le coffre en place et attrapant le paquet défit l’attache, dévoilant la garde en cuir sombre d’une épée. Dégainant la lame dans un sifflement, elle se mit en garde, lame haute, enchaîna quelques moulinets et rengaina d’un geste sec.

Bon… reste à laisser un mot aux autres…

Quelques instants plus tard, Ackeros et Syl, toujours attendant dehors virent sortir l’archère, capuche rabattue, un long paquet dans le dos. Dans ses yeux bleus ont aurait presque pu lire la joie de vivre qu’elle manifestait auparavant. Un sourire en coin elle lâcha.

Allons-y…